Inscription du non-consentement dans la définition pénale du viol
Publié le |
Ce 29 octobre 2025, le Sénat a voté définitivement la proposition de loi modifiant la définition pénale du viol et des agressions sexuelles en intégrant la notion de non-consentement. Cette proposition de loi issue des travaux de la commission mixte paritaire a été adoptée par l’Assemblée nationale le 23 octobre 2025.
En France :
- En 2023, 114 100 victimes de violences sexuelles ont été enregistrées par les forces de sécurité en 2023
- La même année, 61 606 mis en cause pour violences sexuelles ont été enregistrés par la police et la gendarmerie et 6 356 ont été condamnés.
La réforme vise à introduire explicitement la notion de consentement dans la définition du viol. Cette évolution permet de mieux refléter la réalité des violences sexuelles.
Une nouvelle définition du viol et des agressions sexuelles
Déposée le 21 janvier 2025 par les députées Marie-Charlotte Garin et Véronique Riotton, et cosignée par Cyrielle Chatelain et Gabriel Attal, la proposition de loi a suivi une procédure accélérée engagée par le gouvernement le 28 mars 2025. Modifiée pour tenir compte de l’avis du Conseil d’État du 6 mars 2025, elle a été adoptée par l’Assemblée nationale le 1er avril, puis par le Sénat le 18 juin.
Cette réforme inscrit explicitement dans le code pénal la notion de non-consentement de la victime pour qualifier le viol et les autres agressions sexuelles. L’article 222-22 du code pénal sera désormais rédigé ainsi :
« Constitue une agression sexuelle tout acte sexuel non consenti commis sur la personne d’autrui ou sur la personne de l’auteur … ».
Le consentement est évalué en fonction des circonstances et doit être « libre et éclairé, spécifique, préalable et révocable », et il ne peut jamais être déduit du silence ou de l’absence de réaction de la victime, notamment lorsque celle-ci est endormie, inconsciente, sous emprise ou en état de sidération. Cette évolution vise à examiner le comportement de l’agresseur, l’objectif étant de comprendre comment l’auteur s’est assuré du consentement de la victime. Le texte précise également qu’il ne peut y avoir consentement lorsqu’un acte sexuel est commis avec violence, contrainte, menace ou surprise. Suggérée par le conseil d’État, l’ajout de la formulation « quelle que soit leur nature » permet de reconnaître la diversité des formes de contrainte, ce qui permet notamment de recouvrir les cas de sidération ou d’emprise.
Les principales évolutions législatives et jurisprudentielles sur la définition du viol :
1980 | Le viol est défini pour la première fois dans la loi pénale comme « tout acte de pénétration sexuelle commis par violence, contrainte, menace ou surprise. » :
- La loi exige de prouver la contrainte plutôt que l’absence de consentement.
- Le champ de l’infraction est élargi (toutes formes de pénétration, sans distinction de sexe).
- 2006 | La loi du 4 avril reconnaît légalement le viol conjugal, renversant la présomption de consentement au sein du mariage.
- 2010 | La loi du 9 juillet abolit définitivement la présomption de consentement entre époux, établissant que tout acte de pénétration sexuelle non consenti constitue un viol, quel que soit le lien entre l’auteur et la victime.
- 2021 | La loi du 21 avril supprime l’obligation de prouver la contrainte dans les cas de viols commis sur des mineurs de moins de 15 ans ou 18 ans (en cas d’inceste), et crée une infraction spécifique : tout acte sexuel entre un majeur et un mineur de moins de 15 ans est considéré comme un viol, sauf si l’écart d’âge est inférieur à cinq ans.
- 2025 | Dans un arrêt historique du 23 janvier, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) juge que la notion de « devoir conjugal » (article 242 du Code civil) méconnaît la nécessité du consentement dans les relations sexuelles, violant l’autonomie sexuelle et l’intégrité corporelle.
Malgré ces évolutions, cette nouvelle réforme, soutenue par le gouvernement et les associations de défense des droits des femmes, vise à protéger les victimes en clarifiant la notion de consentement, face aux limites de la loi et de la jurisprudence.